Louis XII by Georges Bordonove

Auteur:Georges Bordonove
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Pygmalion
Publié: 2014-01-29T05:00:00+00:00

IX

L'investiture du Milanais

En apprenant la capitulation de Gaète, Louis était tombé malade, si gravement que les médecins désespéraient, une fois de plus, de le sauver. Il avait une sensibilité aiguë, occultée par un optimisme apparent. Le 20 février 1504, il signa un engagement secret, relatif au mariage de sa fille Claude et de François de Valois-Angoulême. Cet engagement confirmait celui qu'il avait souscrit en 1501 sur le même objet.

Il convient ici, afin d'éclairer un jeu diplomatique très complexe, de remonter le temps de quelques années, précisément jusqu'à 1501. C'est en effet le moment où les affaires d'Italie prennent l'aspect d'un conflit réellement européen, que se heurtent les intérêts respectifs de l'Empire, de l'Espagne et de la France et se concrétisent les ambitions des principaux souverains. Il s'ensuit qu'une intense activité diplomatique double et parfois contrarie les événements militaires de cette période. Elle en explique aussi les succès comme les échecs, et témoigne par ailleurs d'une duplicité dont l'Histoire a la naïveté de créditer Machiavel. Ce dernier n'a guère fait plus qu'observer, prendre des notes et les agencer talentueusement !

La politique de Maximilien Ier, maître du Saint-Empire romain germanique, répondait simultanément à trois objectifs. En sa qualité d'empereur, il prétendait exercer un contrôle sur l'Italie, et plus spécialement sur le duché de Milan considéré comme un fief impérial. Ayant épousé Marie de Bourgogne, fille de Charles le Téméraire, il affirmait détenir un droit d'usufruit sur les biens hérités (du chef de sa mère) par Philippe le Beau. Comme chef de la maison autrichienne des Habsbourg, il avait l'ambition de réunir en une seule domination l'Empire, l'Italie, les Flandres, la Bourgogne et l'Espagne. L'indocilité, les initiatives, le tempérament même de son fils le gênaient. Il l'avait pourtant marié à son gré avec Jeanne (la Folle), fille de Ferdinand d'Aragon et d'Isabelle de Castille. Ce mariage avait été sa grande réussite. Il portait en germe les conflits implacables qui allaient opposer les Valois aux Habsbourg. Philippe le Beau, souverain des Pays-Bas et seigneur de la Franche-Comté, n'avait pas les coudées franches. Il essaya pourtant de mener une politique personnelle. Vassal de Louis XII pour l'Artois, la Flandre et le Charolais, il avait obligation de le ménager. Gendre de Ferdinand d'Aragon, il se défiait de lui, le soupçonnant de vouloir capter l'héritage de Jeanne, quand mourrait Isabelle de Castille. Il supportait de plus en plus difficilement la tutelle de Maximilien dont le caractère ondoyant dérangeait ses plans. Il se sentait aussi plus proche de la France, n'oubliant pas que par sa mère il avait du sang capétien.

La position de Ferdinand d'Aragon n'était pas absolument celle qu'attendait Maximilien. Ils avaient cependant un objectif commun : empêcher la France de s'implanter en Italie. Ferdinand d'Aragon avait d'autant plus de raisons de souhaiter l'éviction de Louis XII que l'Italie du Sud était déjà aragonaise. Mais un autre problème le préoccupait. Selon la coutume espagnole, le royaume de Castille devait appartenir à Jeanne et à son mari Philippe le Beau, quand Isabelle décéderait. Prévoyant cette éventualité, il s'était fait attribuer le gouvernement de la Castille par Isabelle.

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